jueves, 22 de diciembre de 2016

ARIEL SPIEGLER [19.773]


ARIEL SPIEGLER

Ariel Spiegler nació en 1986 en Sao Paulo. Vive y trabaja en París.



En el marco del dossier de poesía francófona preparada por Gustavo Osorio de Ita y Sergio Eduardo Cruz, corresponde el turno de Ariel Spiegler, quien es una poeta nacida en Sao Paulo, Brasil, en 1986 y que radica actualmente en la ciudad de París. Las traducciones son de Arturo Velasco.
http://circulodepoesia.com/2016/12/veinte-poetas-francofonos-recientes-ariel-spiegler/



Samba triste

« La realeza: derecho a la insolencia »
Henri Michaux

Compadezco a los hombres sin gracia
por no ser Guillaume,
por no ser Guillaume.
Compadezco también a las mujeres
bellas, quizá, mas que no son nunca
esclavas de Guillaume,
esclavas de Guillaume.
Compadezco a las medias desgarradas,
los ojos en que el negro se deslava,
los talones partidos en la calle,
el rubio de los buenos modales,
los alcoholes que hacen orinar,
los húngaros de alcantarilla,
compadezco al último sacramento
y a las tristes banquetas de Lisboa,
por no ser Guillaume,
por no ser Guillaume.
Y tú, mi pobre Cristo atezado
con tu corona de insomnios
¿de qué eres el rey?
¿de qué eres el rey?



Samba triste

« Royauté : droit à l’insolence »
Henri Michaux

Je plains tous les hommes très laids
de n’être pas Guillaume,
de n’être pas Guillaume.
Je plains aussi toutes les femmes
belles peut-être mais de n’être
l’esclave de Guillaume,
l’esclave de Guillaume.
Je plains tous les bas déchirés,
les yeux dont le noir s’est enfui,
les talons cassés dans la rue,
la blondeur de la politesse,
les alcools bons à faire pisser,
les Hongrois dans les caniveaux,
je plains le dernier sacrement
les trottoirs tristes de Lisbonne,
de n’être pas Guillaume,
de n’être pas Guillaume.
Et toi mon pauvre Christ brun
et ta couronne d’insomnies
de quoi es-tu le roi ?
de quoi es-tu le roi ?


*


Inscribí a tu perro en mi poema
donde babeó por largo rato.
Pienso en los domingos nublados
de suaves lluvias invernales,
de mayo, que nos quiere amando
y besando cada cual a su amante.
Quiero salir de la semana
y volar eternamente.


*


J’ai mis ton chien dans mon poème.
Il y a bavé très longtemps.
Je pense à des dimanches blêmes
d’hiver où il pleut doucement,
au mois de mai qui veut qu’on aime
et qu’on embrasse son amant.
Je veux sortir de la semaine
et voler éternellement.




Chamamé

Intenta sorprender en la ventana a su silueta
aun si su silueta no se encuentra en tu ventana.
Tan sólo fuiste una razón más
para esas furias antiguas. Yo quería creer
que en las aguas nocturnas de su juventud
podría encontrar refugio. Todas esas noches fueron
tan cortas. Ahora debo aprender a callarme.



Chamamé

Essaie de surprendre à la fenêtre son ombre,
même si son ombre n’est pas à ta fenêtre.
Tu as été à peine une raison de plus
pour de vieilles colères. Je voulais croire
que dans les eaux nocturnes de sa jeunesse,
je pourrais me blottir. Toutes ces nuits furent
trop courtes. J’apprendrai à me taire.




***


À peine une minute, rose, 
la camionnette attend au feu : 
chocolatier ou autre chose 
pâtissier. Restez un peu : 
Gérard Mulot. La bouche close 
une fille traverse en bleu.

*

Si j'étais autre chose qu'une 
femme, devant le bas des reins 
et les fossettes d'une brune, 
j'aurais besoin de presque rien 
pour tout accepter, 
et ne plus fermer l'œil. Combien 
se distraire de la tristesse 
serait un acte de vaurien.

*

Avec sa canne de clocharde 
une rousse vieillie navigue 
vers une pente où l'on bavarde 
comme au printemps. 
Voici l'été et je voudrais 
serrer la main de cette dame. 
Où vas-tu cerceau de fatigue ?

*

Il y a les danses solaires 
en robe d'été sur les toits, 
la prostration. Les draps trop froids, 
la paillasse trouée, et l'air 
qui voyage au-dessus de moi.

*

Nous tanguons au clapot des choses. 
Échos de leurs couleurs, le bruit 
– est-ce tristesse ? – nous repose. 
On est une rue de Paris, 
à l'air du soir où les gens causent. 
Deux grassouillettes réjouies 
marchent le long des portes closes, 
et vont en désirant la vie.

*

Pour C.

J'ai rêvé de sa noyade. 
Il disparaissait dans sa clémence froide. 
Dans mes bras mourait ; je ne pouvais 
rien y faire. Je l'avais chéri. 
Son sommeil, petite barque, 
s'en est allée.

*

Je suis restée avec le jour qui se levait 
pluvieux. Je voulais qu'il empêche 
la poussière ; il s'est laissé regarder 
dans l'accouchement de lui-même, nu, 
parce qu'il fallait lui inventer des vêtements 
et se construire un orgueil.

Ariel Spiegler

Passage d'encres III - n° 6 - 4e trimestre 2016.




Afoxé

Il attend des heures – toute la vie –
que le poème arrive.
Il voulait écrire toute sa vie sur une île
ou s’ennuyer à Buenos Aires.
l reste sous la pluie pour regarder danser
les femmes. Il chante et j’entends presque des
comptines avec le cœur léger des bourreaux
de fortune, attend depuis l’âge des pauvres
quand il aura été jaguar, sommeil.
Il ne tenait pas à être cordonnier ; des
lacets jaunes passés à mon cou. Cette histoire
n’est pas drôle. Je voulais broder devant lui
le pan des murs.




Zambita

Sans y penser je désamarre
les belles amours d’une nuit
qu’une nuit n’a pas crues. Ce soir
un peu de pluie s’en va-t-en guerre
et dans la rue elle chantonne
la chanson, tu sais, d’une voix
comme à la guerre, comme à la guerre.



Dialogue

« Mais plus jamais moi je n’irai
battre la mesure de ses hanches
sous son sommeil à l’air vainqueur. »
Il a une longue carrière
de haut fumeur de cigarettes.
On a beau réciter tous les soirs une même
promesse, y croire à poings fermés,
on ne retourne pas les vagues.




Milonga

Cette chose dont je ne portais pas, encore,
la balafre, comment se serait-elle dissoute ?
« Que je t’oublie que je t’oublie
pour que demain la vie revienne ! »
Je pensais, par la force d’un rien,
d’une cerise, ne pas laisser de traces.
« Pendant des heures infinies j’ai bu
ta vie amère. » La pluie se ride
mais je n’ai rien appris.
Je marcherai, qui sait, sans plus savoir comment
tu t’appelais, que je t’oublie.




Bandonéon et guitare

Milonga pour chauffer nos doigts,
milonga pour les hommes saouls.
Milonga des temps maquillés
qui se réveillent sans salaire.
Sombre milonga brésilienne,
uruguayenne et argentine,
milonga de nos peuples bleus
qui se balancent quand il pleut
aux rythmes ronds des purs mensonges.
Milonga pour attendre un soir,
milonga d’une fille armée.
Chanson d’un foulard rouge et noir
qu’agite un danseur de zamba.
Pas double de quelques brigands,
chanson des jambes d’une vieille.
Milonga de nos lèvres sèches,
milonga de nos mains désertes,
étrange tango enfumé
qui parle aux yeux et aux mollets.
Baise tous les hommes pour nous,
milonga de nos yeux défaits.




Pilier

J’aimerais pouvoir dormir à nouveau un beau
jour, dans un jeu de draps amnésiques
où je ne craindrai pas d’entendre
sa parole exacte qui délire à l’envers
du soleil. Il me dit « reste
un petit peu puis prépare
du café. » Une nuit blanche, une autre.
Il faut dire d’autres choses,
ou les dire tard, et des bêtises.
J’ai beau parler, me taire dans une même
gorge, je reste tout aussi pauvre.




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